Sac de frappe

[Paroles de "Sac de frappe"]

[Intro]
J'écris ces mots à l’encre noir, le tonnerre gronde, me surplombe
Un stylo entre moi et l'portrait sombre de ce monde
Ténor, j’dompte mes ombres, traduis des peines énormes
J’mets d'l’ordre, compte les tombes, rature mes plaies, dès lors...

[Couplet unique]
J'me suis fait sans les beaux diplômes, pas un prodige au micro
Mais d'jolis crocs pour survivre dans cette maudite faune
Parfois, j'ai pas les mots qu'il faut, j'ai bеau chercher même dans cеs gros dicos
Pour traduire c'que j'ressens, y'a pas d'émoticône
Loin d'c'que tes homies prônent, tout ça m'détraque ; l'instru'
Un sac de frappe, j'vais lui faire plus de bleus qu'au comico'
Au micro, j'tape et j'sais bien qu'le sac rend pas les coups
J'vomis trop d'rap, c'est mal parti pour qu'j'emballe les foules
Les polito' nous écrasent, s'en battent les couilles
C'est en bas qu'les gens bravent s'entassent et qu'en bavent les foules
Ils ont brûlé les étapes, que mon flow embrase ces fous
Du poison sur mes lèvres, de ma part, embrasse-les tous
Mes démons dans les pattes, j'leur dirai que
Donc, si j'peux pas les combattre, bah j'me servirai d'eux
Machisme et sexisme, j'ai bien saisi les deux
Maint'nant, Aladdin tabasse Jasmine : ouais, l'rêve, il est bleu
Trouver un bon père, c'est rare comme quand un frère s'élève
Des clés s'révèlent avec l'amour, comme dans Interstellar
Le love donne des ailes, comprends si t'en inverses les lettres
J'le répéterai à Marina jusqu'à temps qu'il me gerce les lèvres
Poète maudit, maudit car j'ai les yeux ouverts
Au milieu d'cette folie, vaut mieux garder les deux couverts
Le mal pullule et mon âme s'épuise et s'fait à l'idée
Qu'mes cauchemars cumulés s'ront jamais pires que la réalité
Plus de shinigami qu'd'anges gardiens, ça sent la fin
L'Diable avance entouré d'étranges larbins
C'est d'jà fini, l'ami, quand l'égoïste ronge la main
Le monde peut crever dans l'chaos : rien à foutre tant qu'ça dérange pas l'tien
Écoute à fond c'que j’hurle tout bas
Ici, beaucoup d'coupables, moins d'coups d'pouce que d'coups d’bâton
J’étouffe, pardon, laissez-moi passer
Dans cette foule, j'me sens seul, est-ce moi ou cette planète qui n’tourne pas rond ?
Parfois, j’regrette le temps de mes œillères
Envie d’chialer ou d'tout niquer à chaque fois qu'j'croise une bétaillère
Ou ces faux prédateurs tournant la tête ailleurs
Et, toi, comment oses-tu me dire que ce monde ne t'fait pas peur ?
Va dire ça à ce gamin toquant aux portes du mal
À deux ans, trouvé dans la poubelle de l'orphelinat
À ce p'tit qui se découvre dans mes cours d'écriture
Traduisant les coups d'son père qui, chaque soir, couvrent sa figure
Et ceux de sa mère trop bien ancrée dans sa merde
Oui, elle en a pas l’air, mais même pas la force de crier à l'aide
Cette fille anéantie, une lame glissant sur son poignet
La hantise, violée par trois enfoirés dans son foyer
Ces mêmes pourris qui, pour une jupe, la traitent de pute
Mais, chez eux, jouissent en scred' devant des scènes de cul
Ce militant au crâne fracassé par un condé
Résistant, sa liberté arrachée car indomptée
À ce bovin traîné dans le couloir d'la mort
Qui n’a plus comme horizon qu'l'humain et son coup d'matador
J'crois pas qu'il soit grave d'accord, en sang, proscrit, cerné
Devant tant d’esprits fermés, comprends qu'je claque la porte
Ma plume s'agite quand j'pense à ces millions d’innocents
Égorgés chaque jour au nom du plaisir gustatif
Tâche d’être intègre si t’es pour la justice
Dis-toi qu't’es complice de meurtre à chaque fois qu't’achètes un steak
Sombres incitations
Tout c'qui m'détruit le plus nourrit fortement mon inspiration
J’suis c'gosse seul dans cette cours de récréation
Grandi entre insultes et coups d’balais en guise d'éducation
Cette réfugiée meurtrie qu'on n'laisse passer d’aucune façon
Ses enfants tués sur leurs terres pendant l’occupation
Cette femme hurlant à l'aide avant la pénétration
Cette flamme brûlant la terre, la forêt, pour la plantation
L’esclave qui mourra sans même penser un plan d’action
Cette vache s’faisant violer en pleine période de lactation
C'gamin hésitant devant c'bonbon, cette parka sombre
Nous sommes la pire des espèces, notre barque-là sombre
On veut s'sauver ? Quand coule le navire, c‘est là qu’on s’parle ?
L’Homme est mauvais : c'est pas un avis, c’est un constat
Envers la nature, très snob, un gamin hautin
Vois-tu ? J’ai besoin d’un Death Note d'la taille d’un bottin
Je hais celui qu'j’étais avant, mon ancien moi
Ce passé et, idéalement, son grand ciel noir
En déconstruction, le changement n’est pas prématuré
Plein d’confusions, j’écris à la gomme sur des feuillets raturées
L'rap est enrageant, une terre de fous ; sur c’tableau
J’pose de l’engagement, la paire de couilles sur l’gâteau
Et, vu qu'les plus déter' sont nos sœurs, nos mères
Remplace les testicules par une grosse paire d’ovaires
Un vers pour t'parler d’pilule, ses effets assez horribles
Le monde part en couilles, j'paye ma tournée d’vasectomie
Triste période, les suivants vont vivre un tas d’drames
Époque où, pour t'trouver beau, t’as besoin d'ton filtre Instagram
Dans c'bazar, j'mène ma barque mais j'ai l'mal de mer
Et c'qu'émane de ma mine aboutit en cette vague de lettres
Posté en marge, dans c'monde surmené, j’enrage
Combattant pour la vie, une tête de mort sur mon étendard
Dans c'de-mon', l'Diable a donné l’pas d'danse
Dans la pénombre en cadence
Sans latence, l’Homme démontre
Qu’il est un démon qui n'se connaît pas