Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
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Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
Maxime Le Forestier
Avril 1912, ma femme, mon amour
Un an s'est écoulé depuis ce mauvais jour
Où j'ai quitté ma terre
Je suis parti soldat comme on dit maintenant
Je reviendrai te voir, d'abord de temps en temps
Puis pour la vie entière
Je ne pourrai venir sans doute avant l'été
Les voyages sont longs quand on les fait à pied
As-tu sarclé la vigne ?
Ne va pas la laisser manger par les chardons
Le voisin prêtera son cheval aux moissons
Écris-moi quelques lignes
Hiver 1913, mon mari, mon amour
Tu ne viens pas souvent, sans doute sont trop courts
Les congés qu'on te donne
Mais je sais que c'est dur, cinquante lieues marchant
Pour passer la journée à travailler aux champs
Alors, je te pardonne
Les vieux disent qu'ici, cet hiver sera froid
Je ne sens pas la force de couper du bois
J'ai demandé au père
Il en a fait assez pour aller en avril
Mais penses-tu vraiment, toi qui es à la ville
Que nous aurons la guerre ?
Août 1914, ma femme, mon amour
En automne au plus tard, je serai de retour
Pour fêter la victoire
Nous sommes les plus forts, coupez le blé sans moi
La vache a fait le veau, attends que je sois là
Pour le vendre à la foire
Le père se fait vieux, le père est fatigué
Je couperai le bois, prends soin de sa santé
Je vais changer d'adresse
N'écris plus, attends-moi, ma femme, mon amour
En automne au plus tard je serai de retour
Pour fêter la tendresse
Hiver 1915, mon mari, mon amour
Le temps était trop long, je suis allée au bourg
Dans la vieille charrette
Le veau était trop vieux, alors je l'ai vendu
Et j'ai vu le vieux Jacques, et je lui ai rendu
Le reste de nos dettes
Nous n'avons plus un sou, le père ne marche plus
Je me débrouillerai, et je saurai de plus
En plus être econome
Mais quand tu rentreras diriger ta maison
Si nous n'avons plus rien, du moins nous ne devrons
Plus d'argent à personne
Avril 1916, ma femme, mon amour
Tu es trop généreuse et tu voles au secours
D'un voleur de misères
Bien plus riche que nous. Donne-lui la moitié
Rendre ce que l'on doit, aujourd'hui, c'est jeter
L'argent au cimetière
On dit que tout cela pourrait durer longtemps
La guerre se ferait encore pour deux ans
Peut-être trois ans même
Il faut nous préparer à passer tout ce temps
Tu ne fais rien pour ça, je ne suis pas content
Ça ne fait rien, je t'aime
Ainsi s'est terminée cette tranche de vie
Ainsi s'est terminé sur du papier jauni
Cet échange de lettres
Que j'avais découvert au détour d'un été
Sous les tuiles enfuies d'une maison fanée
Au coin d'une fenêtre
Dites-moi donc pourquoi ça s'est fini si tôt
Dites-moi donc pourquoi, au village d'en haut
Repassant en voiture
Je n'ai pas regardé le monument aux Morts
De peur d'y retrouver, d'un ami jeune encore
Comme la signature