C'était à Hanoi, un matin
Dans l'aube d'un ciel incertain
Ce jour-là, le pavé qu'avaient
Lavé les averses luisait
Soudain, au détour d'une rue
Anonyme, elle m'est apparue
Elle ne brillait d'aucun appas
Pourtant, j'ai ralenti le pas
Pourquoi m'attirait-elle autant
La Pagode du Cheval blanc?
La bâtisse était fort commune:
Crépi vieil ocre et tuiles brunes
Coiffées de dragons ondulants
Glissant au-dessus des banians
Devant la porte, une vieille
Vendait des mangues et de l'oseille
Rien qui expliquât les raisons
Qui m'ont fait gravir le perron
Dans la pénombre et les senteurs
De thé de résine et de fleurs
L'oncle Ho côtoyait Bouddha
Confucius Lao-Tseu et là...
Là, je découvris en tremblant
Une statue de cheval blanc
Que faisait donc parmi les dieux
D'or de jade et de bois précieux
Ce destrier de carrousel
Semblable à ceux de nos Noëls?
Pendant quelques instants, j'ai cru
A cette rencontre incongrue
Que je pourrais, les yeux fermés
Me retrouver à tes côtés
C'était à la fête foraine
D'un dimanche au bord de la Seine
Tu disais: "Je t'aimerai toujours
Mon amour."
Ailleurs, là-bas, pourquoi chercher
A fuir les émotions passées
Puisqu'elles renaîtront si nettes
À l'autre bout de la planète?
Un peu plus seule, je suis sortie
Du temple où il avait suffi
D'un rien dans la carte postale
Pour me mettre le coeur à mal