Il serait temps que l'homme s'aime
Depuis qu'il sème son malheur
Il serait temps que l'homme s'aime
Il serait temps, il serait l'heure
Il serait temps que l'homme meure
Avec un matin dans le cœur
Il serait temps que l'homme pleure
Le diamant des jours meilleurs
"Assez ! Assez !"
Crient les gorilles, les cétacés
"Arrêtez votre humanerie
Assez ! Assez !"
Crient le désert et les glaciers
Crient les épines hérissées
"Déclouez votre Jésus-Christ !
Assez !
Suffit."
Il serait temps que l'homme règne
Sur le grand vitrail de son front
Depuis les siècles noirs qu'il saigne
Dans les barbelés de ses fronts
Il serait temps que l'homme arrive
Sans l'ombre avec lui de la peur
Et dans sa bouche la salive
De son appétit de terreur
"Assez ! Assez !"
Crie le ruisseau dans la prairie
Crie le granit, crie le cabri
"Assez ! Assez !"
Crie la petite fille en flamme
Dans son dimanche de napalm
"Éteignez-moi je vous en prie
Assez !
Suffit."
Que l'homme s'aime c'est peu dire
Mais c'est là mon pauvre labeur
Je le dis à vos poêles à frire
Moi le petit soldat de beurre
Que l'homme s'aime c'est ne dire
Qu'une parole rebattue
Et sur ma dérisoire lyre
Voyez, déjà, elle s'est tue
Mais voici que dans le silence
S'élève encore l'immense cri
"Délivrez-vous de vos démences !"
Crie l'éléphant, crie le cricri
Crient le sel, le cristal, le riz
Crient les forêts, le colibri
Les clématites et les pensées
Le chien jeté dans le fossé
La colombe cadenassée
Entendez-le ce cri immense
Ce cri, ce rejet, cette transe
"Expatriez votre souffrance"
Crient les sépulcres et les nids
"Assez ! Assez !
Fini."